jeudi 12 mars 2015

L’heure de la tentation


Lecture : Luc 22/ 1 à 46
« Le fils de l’homme s’en va, selon ce qui est écrit de lui. Mais malheur à l’homme par qui le Fils de l’homme est livré ! Mieux vaudrait pour cet homme qu’il ne fut pas né. » Matthieu 26/ 24.
« Veuillez et priez, afin que vous ne tombiez pas dans la tentation ; l’esprit est bien disposé, mais la chair est faible. » Matthieu 26/ 41

L’amour que nous devons à la vérité nous oblige à repenser continuellement la façon dont nous la comprenons. La vérité étant une chose vivante, nous ne pouvons pas l’étouffer dans le cadre trop étroit de nos représentations mentales conditionnées par notre éducation, notre héritage intellectuel ou notre entourage. C’est pourquoi il ne faut pas s’étonner si nous avons parfois le désir, le besoin et la soif de nous affranchir des vieilles formules et de revoir avec des yeux neufs le message qui se dégage de la vie, des activités et des paroles de Jésus.

La fête juive de la Pâque a été pour Jésus l’occasion d’une démonstration exceptionnelle de la vérité. Cette vérité qu’il a toujours généreusement proclamée rappelle à l’homme qu’il est un être libre, douée d’une volonté personnelle, ainsi que l’a décrété son Créateur dès les origines. La Pâque est essentiellement une fête de la liberté. Elle rappelle la sortie d’un peuple hors de la maison de servitude. Elle signe pour toujours l’arrêt de mort de la puissance des ténèbres ; la création ne sera pas indéfiniment asservie aux forces dégradantes de l’esclavage.
      1. Le drame pouvait-il être évité ?

Jésus n’a pas été la victime d’une inévitable fatalité. Jamais autant qu’au moment de la tragédie de la 
croix, tout ce qui se passait n’a été marqué que par le signe de la liberté. Ce côté des événements passe le plus souvent inaperçu et il est un des plus important. Les ennemis sont libres, Barabbas est libre, Judas est libre, tous sont libres d’accuser, de trahir, de s’enfuir, d’aimer ou de haïr, d’arrêter Jésus et de le crucifier, parce que simplement Dieu l’a voulu ainsi. Même à ce point là Dieu honorera le principe de liberté dont il a doté l’homme, créature faite à l’image du Dieu libre.

Il est cependant une chose qui est encore plus importante et qui doit éclairer ce sombre tableau, c’est que Jésus a LIBREMENT accepté d’être une victime sans défense, innocente, mais JAMAIS, au grand jamais, livré contre sa propre volonté. S’il était déterminé que Jésus devait un jour mourir, il avait parfaitement la liberté de choisir sa manière de mourir. Il POUVAIT très bien remettre son Esprit entre les mains de son Père AVANT la croix. C’est sa prière à Gethsémané qui le laisse clairement entendre.

Sil s’en réfère à son Père Céleste c’est parce qu’il aime par dessus tout accomplir la volonté de ce Père Bien-aimé. Et ce Père Divin sait qu’il peut compter sur son fils pour témoigner jusqu’au bout, à un monde pervers, de la qualité de son Amour. Ainsi se vérifie la parole du Psaume 103 : «L’Éternel est miséricordieux et compatissant, lent à la colère et riche en bonté. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant sa bonté est grande pour ceux qui le craignent ».

Si Dieu a donc usé d’une miséricorde infini et pardonné si généreusement à « ceux qui ne savaient pas ce qu’ils faisaient », comment pourrions nous encore mettre en doute la réelle bonté et la profonde affection qu’il a pour ceux qui le craignent ?

Le chemin de la croix est celui d’un sort librement consenti, non pas en vue d’édifier une théologie ou une dogmatique plus ou moins abstraite et sujette à d’inépuisables discussions, mais pour démontrer, sur le terrain concret de l’existence humaine, la réalité d’un amour et d’une confiance sans borne envers le Dieu dont Jésus révèle cette indéfinissable qualité : L’AMOUR PATERNEL. Un amour qui prouve sa qualité par le PARDON envers des fils rebelles et qui démontre son efficacité par la transformation qu’il opère dans leur cœur, lorsque ceux-ci reviennent vers lui, cet amour de Dieu est une réalité toujours actuelle et absolument parfaite.

      1. Le triste cas de judas
Il n’a jamais été obligé de suivre Jésus et Jésus ne l’a jamais obligé à le quitter. Comme les autres disciples, il a été choisi, non en vertu de ses mérites mais de la divine bonté de Jésus qui lui offre une voie nouvelle d’épanouissement et de service. C’était lui qui en avait certainement le plus besoin. A cause de certaines de ses qualités humaines il était le trésorier du groupe. Il croyait comme les autres disciples, à la messianité de Jésus et était également intéressé par les avantages matériels qu’il pourrait en retirer lorsque son maître accéderait au trône d’Israël.

Mais le terrible défaut de Judas sera de douter de la loyauté de Jésus et de son désintéressement. S’il est d’accord avec l’idée du règne futur de Jésus, il ne l’est pas du tout sur les procédés qu’Il adopte pour y parvenir. Judas est un arriviste et il est profondément déçu de voir comment Jésus laisse échapper la totalité des bonnes occasions pour s’assurer l’adhésion en masse de la foule. C’est une nature égocentrique et son ambition humaine se reflète dans ses réactions. Il est impatient d’obtenir facilement les privilèges qu’il entrevoit auprès d’un Seigneur aussi puissant que Jésus.

La tension psychologique de la foule et des disciples étaient telle qu’on s’attendait à un coup d’éclat de la part de Jésus. On savait que les autorités le surveillaient et avaient décidé de se saisir de lui et on pensait que Jésus ne tarderait pas à manifester son pouvoir souverain pour établir son règne : voir Luc 19/ 11.

On imagine facilement la réaction de Judas quand il constata exactement le contraire de ce qu’il espérait. Jésus avait cependant plusieurs fois averti ses disciples qu’ils seraient tous scandalisés par son étrange comportement, contraire à la logique humaine et, surtout, à l’enseignement religieux jusqu’alors accepté concernant la personnalité du Messie.

Judas met alors toute sa pensée et sa volonté au service de sa propre ambition et projette de précipiter les événements. Il est convaincu que Jésus saura se défendre s’il est vraiment ce qu’il dit, mais, inconsciemment ou consciemment, il est difficile d’en juger, Judas veut compenser sa propre déception en sollicitant l’honneur des autorités en place. Sa déloyauté est totale et prépare sa trahison.
      1. Le plus grand malheur
Un égoïsme forcené conduit à l’autodestruction de l’individu. Judas est appelé, dans Jean 17/ 12, le fils de perdition parce qu’il est le représentant typique de ce qui est entièrement retourné sur soi-même et finit par s’effondrer sur soi-même dans une totale inutilité.

On sait que Satan, prince déchu d’une planète en désordre, avait le dessein de discréditer Jésus par une mort humiliante afin qu’il devint impossible aux hommes de le reconnaître comme Souverain envoyé par Dieu. L’acceptation de la croix est un défi qui rend la victoire de Jésus absolue, définitive et incontestable sur le plan de la juridiction céleste. Satan a donc cherché tous les moyens de faire échec au plan de Dieu, mais il s’est trompé dans ses appréciations.

Dans cette sombre entreprise une chose est certaine, c’est que Satan avait obligatoirement besoin d’un ACCORD de la volonté humaine pour pouvoir œuvrer. Il faudra toujours souligner avec insistance le fait que la liberté humaines est une chose sacrée et que, même Satan, n’a ni le droit ni le pouvoir d’en disposer. Il ne peut que s’assurer le concours de la volonté humaine quand cette volonté se trouve être seulement en ACCORD avec la sienne.

Il se trouve donc que Judas ayant librement choisi d’être ce qu’il est, Satan a trouvé en lui une porte grande ouverte et en a profité. Satan ne pouvait infléchir et occuper une volonté humaine que si celle-ci était consentante. A un certain moment la décision de Judas est devenue irréversible et il est allé jusqu’au bout de ses projets.

Jésus n’a jamais condamné Judas, pas plus que les hommes qui l’ont fait mourir. Son dernier cri a été de pardonner. Mais le pardon n’a pas d’effet s’il n’est pas reçu et l’homme établi lui-même son propre jugement à la mesure exacte de ses mérites. Le malheur qui frappe Judas ne vient ni du ciel ni de l’enfer mais de sa propre conscience.

Il réalise soudain qu’il n’est plus maître des événements et que l’innocence de Jésus n’est pas reconnue, bien qu’il aille en faire part aux autorités auxquelles il avait livré Jésus. Il ne s’attire que du mépris et une totale incompréhension pour son repentir. Alors le grand malheur se produit : il se retrouve TOUT SEUL. Il est COSMIQUEMENT SEUL, il s’est coupé de l’aide miséricordieuse de Jésus, il est méprisé par les autorités, il est même lâché par Satan qui n’a que faire de cet instrument désormais INUTILE

C’est un jugement atroce qu’il s’est infligé par son égoïsme et il ne lui reste plus qu’à se détruire de désespoir.

Pourquoi Jésus pense-t-il qu’il eut mieux valu que cet homme ne soit pas né ? La seule réponse valable parait être celle qui révèle le désir de Dieu de ne voir aucune des innombrables créatures de l’univers se perdre dans une totale inutilité. Judas s’est anéanti lui-même et c’est une vie gaspillée, et Jésus a une fois montré qu’il n’aimait pas le gaspillage.
Judas est devenu comme s’il n’avait jamais été et Jésus ne donne à personne le droit de juger ou de condamner…

Il avait manqué à Judas d’aimer sincèrement son Maître. Si cet amour avait existé, même après avoir fait ce qu’il a fait, sa repentance aurait eu une voie toute tracée pour lui assurer son retour.
      1. Le crible purificateur

Le comportement des disciples n’a pas été non plus, glorieux dans cette difficile épreuve. Mais ce qui les a finalement préservés de l’irréparable c’est qu’ils ont toujours eu un sincère amour pour Jésus et qu’ils avaient confiance en lui. Pierre est l’image vivante de la maladresse et de l’action irréfléchie, mais il y a toujours de l’espoir quand il y a la sincérité et l’amour vrai au fond d’un cœur humain.

L’épreuve les a durement secoués. Satan a voulu répéter l’histoire de Job. Il pense que l’intérêt personnel, égoïste et matériel est le seul est le seul motif de l’attachement des disciples à Jésus. C’est pourquoi Jésus accepte le défi car il sait que le crible fera tomber les illusions des disciples, MAIS PAS LEUR AMOUR. Jésus a prié pour eux, c'est-à-dire qu’il s’est assuré du concours des puissances célestes au service de l’amour de Dieu pour préserver les siens. L’Amour répond toujours à l’amour.

Les disciples aussi aspiraient à la grandeur matérielle et aux honneurs terrestres. Juste avant le dernier repas ils ont encore trouvé le moyen de se disputer au sujet de celui qui serait le plus grand dans le Royaume. C’est la mort de Jésus qui a détruit en eux l’illusion de la fausse grandeur. Un bonheur ne peut pas être vrai ni durable s’il est limité par le temps et s’il se flétrit comme l’herbe. Le seul Royaume où notre joie puisse être parfaite est un Royaume Spirituel.

Jésus leur promet qu’ils seront assis sur des trônes. Si les espérances matérielles des disciples ne peuvent être réalisées c’est parce que le Maître leur réserve une gloire bien supérieure à ce qu’ils imaginent, une Gloire incorruptible et éternelle parce que de nature supérieure à la matière .

Pour l’instant, il leur enseigne que la grandeur consiste à servir et le Royaume de Dieu est véritablement au milieu d’eux quand ils font cela : Luc 17 :20. L’homme fait son propre bonheur comme il peut faire aussi son propre jugement. Mais pour le bonheur il est au moins aidé par la propension naturelle du cœur de tout homme vers ce bonheur. Il suffit de le chercher au bon endroit : DANS SON PROPRE CŒUR. Si notre cœur est sincèrement pour Dieu rien ne pourra nous séparer de son amour. Les épreuves, les échecs, les imperfections, les erreurs, les chutes, la vie, la mort, les anges, les puissances célestes ou terrestres, rien ne peut jamais empêcher l’Amour de Dieu de répondre à l’amour sincère de sa créature, où qu’elle soit et quoi qu’elle soit. Romains 8/ 37-39.
      1. Veillez et priez

Lorsque les disciples auront appris à se faire les serviteurs les uns des autres, ils réaliseront que c’est là que règne la plus grande liberté. Quand tout le monde sert, il n’y a plus de serviteurs car chacun est servi et chacun est prince.

Nous faisons ici-bas l’apprentissage de la gloire. L’amour n’est pas instantanément parfait mais il le devient progressivement quand il apprend à discerner les choses les meilleures. C’est cela veiller. C’est comprendre intelligemment la volonté de Dieu afin d’éviter les tentations, c’est-à-dire les épreuves inutiles, pour avancer plus vite et mieux vers les demeures éternelles du Royaume divin de la joie et de la gloire. 
Samuel GUILHOT
22/03/1970

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