jeudi 12 mars 2015

Le cantique de Moïse

 Lecture : Exode 15 ; Apocalypse 15
« Alors Moïse et les enfants d’Israël chantèrent ce cantique à l’Eternel. Ils dirent :
«  Je chanterai à l’Eternel, car il a fait éclater sa gloire ;
«  Il a précipité dans la mer le cheval et son cavalier.….
«  … Et ils chantèrent le cantique de Moïse, le serviteur de Dieu, et le cantique de l’agneau, en disant : tes œuvres sont grandes et admirables, Seigneur Dieu tout-puissant ! Tes voies sont justes et véritables, roi des nations ! Qui ne craindrait, Seigneur, et ne glorifierait ton nom ? Car seul tu es saint. Et toutes les nations viendront, et se prosterneront devant toi, parce que tes jugements ont été manifestés. »

Ce cantique de Moïse, qui fut chanté spontanément à l’aurore de la création d’un peuple et sera repris avec allégresse à l’inauguration des temps nouveaux, est tout entier motivé par la joie de la libération. En dépit de toutes les menaces d’asservissement, le don précieux de la LIBERTÉ sera éternellement sauvegardé par le Créateur de l’homme libre. Tout le récit de la sortie d’Égypte est l’histoire du triomphe de la liberté. Tout le long drame historique du peuple d’Israël concerne l’apprentissage de la liberté. Tout le message de Dieu par la révélation biblique envisage la liberté de tous les hommes et de tous les peuples.


Ceux qui aiment la liberté doivent comprendre qu’elle ne peut pas être seulement physique. Ceux qui connaissent et adorent la vrai Dieu sont des êtres vraiment libres. Ils le sont vraiment parce qu’ils le sont en profondeur, dans leur être pensant et affectif. Ils affirment en eux-mêmes cette liberté par leur volonté de rechercher le vrai Dieu et de le trouver, directement, sans intermédiaire, pour eux-même. Ils prennent la liberté de croire qu’ils ne seront pas trompés par ce Dieu qu’ils cherchent et qui se révélera au-dedans d’eux, dans ce seul véritable temple où peut s’établir la seule religion : celle de l’expérience personnelle.

Le peuple de l’Egypte était entièrement quadrillé par un réseau étroit de règlements, de rites et de cérémonies religieuses. Les âmes étaient esclaves, comme les corps. Cette main mise était si forte que même les hébreux en subiront une profonde et durable empreinte. Ils eurent beaucoup de difficulté à comprendre le sens et la portée de leur libération physique et se rendirent eux-mêmes trop souvent les esclaves de leur propre système religieux. Il faut toujours un certain temps aux âmes des hommes pour comprendre la valeur et la signification de l’idéal le plus élevé qui soit : celui de la LIBERTÉ SPIRITUELLE.

Toutes les autres libertés dépendent de celle là. On est confondu de voir tant de systèmes religieux prétendre proclamer le message de la vérité tout en évitant de donner aux âmes le moyen de développer leur propre liberté de penser. La vérité est inconcevable sans la liberté. Beaucoup trop de chefs religieux imposent leurs façons de penser et de concevoir la vérité, alors que c’est la vérité elle-même qui doit orienter la pensée humaine. Et à ce signe on reconnaît qu’une âme découvre la vérité : elle se libère de la peur et de la superstition par une connaissance personnelle de Dieu qu’elle apprend à servir par amour en aimant et en respectant sincèrement son prochain.
      1. Le cantique de l’agneau

Le cantique de Moïse est le chant plein d’espérance qui introduit dans l’expérience d’une libération spirituelle. Il sera normalement complété par celui de l’agneau parce que l’expérience aura finalement démontré par quel genre de puissance s’effectue toute libération spirituelle.

Les violences et les destructions sont la caractéristique des fausses libérations. Les libertés physiques n’apportent pas automatiquement la libération de la peur, du ressentiment ou de la haine. La pensée et le cœur des hommes peuvent rester les prisonniers malheureux des faux espoirs, des déceptions et de la crainte. L’agneau représente celui qui a triomphé de toutes les formes de violence et de haine PAR LA PUISSANCE DU PARDON. Si Jésus est appelé l’agneau de Dieu c’est parce qu’il a fait la démonstration, dans son existence terrestre, de cette vertu absolument souveraine de la bonté miséricordieuse. Sa force résidait toute entière dans le caractère de sa vie intérieure paisible, confiante, parfaitement droite, saine et équilibrée. Crucifié par l’ignorance d’une humanité qu’il veut sauver, lié sur le bois d’infamie, il a encore proposé le pardon à ses persécuteurs. Il était physiquement prisonnier, mais spirituellement libre ; et c’est CETTE liberté qu’il nous offre.

La puissance de l’Esprit de Jésus est infiniment supérieure à toute autre énergie. Elle est toujours actuelle et devient agissante dans le cœur de tous ceux qui veulent sincèrement se libérer des méfaits de la crainte et de la haine. Le pardon de Dieu n’est pas une affaire qui regarde la théologie, ce n’est pas une abstraction. C’est un fait réel dans l’âme de celui qui décide de pardonner aux autres parce qu’il a reçu lui-même le pardon de Dieu. Le remède à beaucoup d’angoisses et de névroses se trouve là.
      1. Et vous, gardez le silence. (Exode 14/ 14)

Ils n’ont jamais été aussi près de la liberté qu’au moment où la détresse était la plus grande. Ils ne pouvaient pas prévoir comment s’opérerait leur délivrance et ils s’en tenaient à ce qu’ils constataient autour d’eux. La délivrance devait d’abord être dans leur propre cœur ; en exprimant ouvertement leurs craintes, ils les rendaient encore plus vives. Ils étaient humains, comme nous tous. Il fallait qu’ils apprennent à garder le silence, non pas le silence vide de la résignation, mais celui des certitudes. Non plus le bruit confus des « comment » et des « pourquoi », mais le silence confiant de celui qui sait attendre le moment où tout s’explique et se comprend.

La libération spirituelle a toujours pour conséquence de ne plus rien placer entre Dieu et soi. Les événements de l’existence sont désormais perçus au travers de Dieu, et non plus le contraire. Il en est de même lorsque nous voyons les hommes à travers Dieu. Il n’y a plus de raison alors de perdre courage, de s’irriter ou d’avoir peur. L’envie ou la jalousie ne trouvent plus de racines dans le cœur qui trouve son plaisir en l’Eternel et qui garde le silence en espérant en lui. (Psaumes 37).

Ne plus avoir des sentiments amers contre personne, ne plus trembler de peur devant l’avenir, ne plus craindre de chercher la vérité pour soi-même là où elle se trouve, ne plus douter de l’affection paternelle d’un Dieu qui nous connaît parfaitement, n’est ce pas là la plus grande des libertés !
      1. L'Éternel est un vaillant guerrier (Exode 15/ 3)

Dans le texte hébreu, cette expression est beaucoup moins nuancée ; elle se dit littéralement : L’Eternel est un homme de guerre. On peut se laisser surprendre par de telles expressions qui font que bien des gens croient que Dieu se plaît à faire la guerre. On dit même que le Dieu de l’Ancien testament est un Dieu guerrier et sanguinaire. En parlant ainsi on ne saisit pas la différence entre le fait des guerres inévitables à cause de l’imperfection humaine, et le fait de l’intervention divine pour garantir la survie des valeurs fondamentales et protéger les intérêts supérieurs d’une humanité en constante évolution. Ces valeurs sont le respect de la personnalité humaine, et ces intérêts sont les expériences nécessaires qui permettent à l’homme de reconnaître son besoin primordial de libération spirituelle.

De plus, il ne faut pas considérer la guerre toujours sous son aspect répugnant de cadavres et de ruines matérielles. Il ne faut pas confondre l’effet avec la cause. Toute guerre a pour origine une conception mentale particulière de l’existence. Ce sont d’abord des conflits d’idées qui dressent physiquement les hommes les uns contre les autres. Ce sont en fait des guerres spirituelles. L’Apocalypse parle de guerres dans le ciel (12/ 7). Ce sont des guerres dont nous pouvons avoir une image dans les débats et les conflits juridiques qui opposent les politiques humaines. Jésus a connu l’adversité et la nécessité de s’affermir continuellement dans sa volonté de faire la volonté de son Père céleste, de faire triompher la justice par la bonté et la miséricorde. L’apôtre Paul a du combattre jusqu’à la fin de sa vie le bon combat de la foi. Toutes ces luttes ont été soutenues sur le terrain du cœur, de la pensée et de l’esprit. C’est à cause de sa pensée et de son message que Jésus a été combattu, et c’est à cause de leur étroitesse de cœur et de pensée que ses persécuteurs ont lutté contre lui. Mais Jésus ne s’est pas physiquement opposé à eux parce qu’il était spirituellement libre et qu’il savait que c’est seulement par leur transformation spirituelle que ses ennemis pouvaient devenir ses amis. Jésus était le plus fort parce qu’il n’avait pas peur de perdre ses valeurs spirituelles de justice et de bonté dans la destruction de son corps matériel.

Jésus était fort parce que son esprit se nourrissait d’un pain vivant et pur : la communion spirituelle directe et personnelle avec son Dieu Père, affectueux, aimant les hommes et désirant se révéler à eux par le caractère parfaitement humain de son fils incarné.

Nous comprendrons encore mieux cela quand nous saurons que le mot guerre signifie dans la langue des hébreux «  ce qui est pour le pain ». La guerre est ce qui permet de subsister. On se bat pour le pain, mais aussi par le pain qui nourrit le combattant. La question du pain est donc fondamentale, mais il faut reconnaître qu’elle est fondamentale surtout parce qu’elle révèle un besoin SPIRITUEL. Si les hommes se sont battus pour le pain matériel c'est à cause d’un manque de climat de confiance, de générosité, d’altruisme et d’amour du prochain.

C’est pourquoi ce même Dieu, que certains croient guerrier à la manière des hommes, déclare dans sa Parole : L’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de tout ce qui sort de la bouche de l’Eternel. (Deutéronome 8/ 3).  Jésus s’est proposé aux hommes comme étant le pain vivant qui descend du ciel, directement. Il le propose d’une façon concrète et pratique en disant : celui qui me mange vivra par moi ; cette parole annonce l’effusion de SON Esprit dans l’esprit de l’homme pour lui communiquer l’énergie nécessaire à son développement spirituel.

Dieu est un « un homme de guerre »  parce qu’il donne le pain. Et c’est ainsi que la fin de la phrase de ce verset 3 prend tout son sens : L’Eternel est son nom. Le nom divin résume en lui-même l’indestructible et l’éternelle existence de l’Etre. Dieu combat pour amener les hommes à reconnaître leur besoin de libération spirituelle pour une vie éternellement progressant dans la lumière et le bonheur. En acceptant d’être physiquement vaincu et brisé, Jésus a fait la démonstration de sa victoire spirituelle sur le mal et la mort. Personne n’a pu s’approprier son corps physique, mais tout homme qui le désire peut recevoir en lui-même et pour lui-même une part de SON Esprit. Ce pain vivant de communion spirituelle est directement donné à celui qui a faim de justice et de miséricorde, et qui veut survivre au-delà de la mort physique.
      1. Vers les demeures de la sainteté (Exode 15/ 13)

Les véritables ennemis de l’homme se trouvent dans son cœur et dans sa pensée, et c’est là qu’ils peuvent être vaincus par l’effusion de l’Esprit triomphant de Jésus. Ce qui lui fait mal et le tient captif, ce sont ses propres conceptions erronées sur la nature du vrai Dieu, son ignorance des réalités spirituelles et son aveuglement sur les véritables sources de la vie. Le résultat visible est qu’il n’arrive pas à être vraiment heureux et satisfait.

Mais, aussi impressionnante soit-elle, cette armée de faits négatifs peut être entièrement vaincue par le seul fait positif de la présence réelle d’une part vivante de l’Esprit de Dieu dans le cœur de l’homme. La religion n’a aucun sens si elle n’ouvre pas à l’individu un accès direct dans le royaume du Dieu de la liberté et de l’épanouissement spirituel. Elle ne doit pas dire : venez à moi, mais : allez à Dieu et marchez ensemble sur le chemin du ciel.

Le miraculeux passage de la mer est encore aujourd’hui symbolisé par le baptême, rite déjà pratiqué au temps de Jésus. Il a revêtu une signification quasi magique dans bien des milieux religieux, ce qui lui donne un caractère entièrement faussé. Mais là où il garde son sens de témoignage vivant à une expérience personnellement et consciemment vécue, il est le point de départ d’une route désormais ouverte sur l’éternité. C’est la route du développement de la foi et de la compréhension des réalités spirituelles. C’est la route qui devra traverser les déserts où surgiront parfois des ennemis bien connus tels que le doute, la perplexité, l’anxiété ou le découragement. Mais c’est la route absolument sûre parce que Dieu y accompagne lui-même ses enfants en éduquant leur foi et leur confiance par les victoires successives de l’esprit. C’est l’apprentissage de la liberté, le perfectionnement de l’aptitude à s’en servir pour accéder au bien le meilleur et à une jouissance toujours plus profonde du vrai bonheur.

Le chant de la liberté est chanté par ceux qui ont acquis la certitude d’être des enfants de Dieu, qui savent que leur chemin terrestre débouchera inévitablement sur les mondes célestes de la lumière et de la perfection où pourra enfin se réaliser le meilleur de toutes leurs meilleures aspirations et de leurs idéaux les plus élevés. La montagne de Dieu est sur le sommet des montagnes et c’est là qu’est fondé le sanctuaire de la justice, de la bonté et de la miséricorde préparé par le Seigneur pour accueillir ceux qui ont, une bonne fois et volontairement, décidé d’y monter.
Samuel GUILHOT
14/06/1970

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