Lectures : Jean 6/ 46 à 71 ; Matthieu 26/ 26 à 29
Le
verset 46 de Jean 6 nous montre qu’il est indéniable que Dieu a
placé en tout homme la possibilité de trouver Dieu. La lumière est
venue chez les hommes mais pour beaucoup il manque malheureusement le
souffle de la foi pure et directe pour ranimer cette lumière
intérieure qui peut si prodigieusement illuminer la conscience. S’il
est vrai, comme le fait remarquer Jésus, que personne n’a jamais
vu le père cela ne l’empêche pas d’être présent dans le cœur
de l’homme pour l’inciter patiemment et avec beaucoup de bonté à
croire en Lui. C’est là le premier enseignement que chacun peut
percevoir en Lui ; non un enseignement avec des mots audibles
qui frapperait uniquement l’intelligence mais cette sorte de
constant attrait sur la conscience profonde vers autre chose, vers
quelque chose de plus grand, de plus pur, de plus vrai et de plus
beau, quelque chose qui échappe à l’emprisonnement du temps et de
l’espace : en un mot, la vie éternelle.
Le
pain de la culture humaine ne manque certes pas de saveur ni
d’ingéniosité ni même de beauté, mais c’est une nourriture
qui ne peut en aucun cas répondre à cette soif profonde d’éternité
qui nous fait tous soupirer de différentes manières, que nous le
voulions ou non. Le pain que Jésus nous propose n’est comparable à
aucun autre par sa qualité et par son efficacité pour nourrir notre
cœur et notre esprit de réelles certitudes.
La vie éternelle est une réalité du présent
Ce
n’est pas avec des mots et des phrases que nous pouvons nous
assurer de cette réalité. En matière religieuse, il convient
d’être réaliste aussi bien que dans les autres domaines de la vie
courante. Ce réalisme consiste à reconnaître le besoin toujours
constant de notre cœur de pouvoir s’appuyer sur des certitudes par
lesquelles l’horizon de notre existence sera infiniment reculé. Il
est bon d’espérer mais pas d’une façon résignée et passive.
Si
la vie éternelle est une réalité du présent, elle doit avoir de
profondes répercussions sur le caractère de notre vie terrestre.
Beaucoup de gens croient vivre chrétiennement parce qu’ils se
conforment à certaines habitudes religieuses héritées de leur
enfance mais sans que cela modifie d’une manière quelconque leur
comportement en face de l’existence. Ils ne sont ni plus heureux,
ni plus satisfaits que les autres et n’éprouvent en tout cas pas
ce profond désir de communiquer autour d’eux le témoignage
réconfortant de leurs expériences religieuses et de leur contact
personnel avec Dieu.
Il
est lamentable de constater parfois l’ignorance des enseignements
élémentaires de Jésus chez ceux qui se réclament du
christianisme. La majeure partie des hommes et des femmes ont été
baptisés et consacrés à l’église chrétienne alors qu’ils
étaient encore que des bébés inconscients mais dans l’expérience
réelle de l’existence on ne voit pas beaucoup de résultats à la
suite de ce rituel imposé. Le monde reste ce qu’il est et les
anciens « baptisés » restent souvent dans un total
aveuglement concernant la réalité et l’expérience spirituelle
avec Dieu.
Comprenons
bien que c’est la vie qui donne aux choses leur valeur. Un bel
enfant vivant a quelque chose de gracieux et d’attirant qui fait
plaisir à voir et à entendre et que l’on aime. Mais s’il vient
à perdre la vie, ce n’est plus qu’une chose qu’il faut ôter
de devant soi et enterrer. N’est-ce pas là un peu l’image que
l’on peut se faire de la religion chrétienne et qui explique
pourquoi elle n’a aucun attrait quand elle est dépourvue de vie et
de certitudes.
Le signe certain de la vie éternelle
Si
la vie éternelle est une simple espérance de vivre à toujours dans
le ciel, elle ne peut nous apporter une réelle satisfaction pour le
temps présent. Même la certitude de cette vie à venir ne suffit
pas à nous encourager et à nous réconforter si nous n’avons pas
compris son caractère essentiel qui est la croissance.
Toute
vie normale se manifeste par la croissance et le développement
continu des facultés d’adaptation, de perception et de
compréhension. C’est ainsi que nous devenons des hommes et
atteignons la maturité.
Sur
le plan terrestre c’est donc au moment où l’on pourrait le mieux
profiter de la somme de ces expériences passées qu’il faut
disparaître. C’est ce qui fait le chagrin de beaucoup de
vieillards. Lorsque nous considérons la mort comme la fin d’une
étape nous la comprenons mieux car nous ne pouvons pas vivre
indéfiniment dans un organisme matériel de chair et de sang trop
assujetti aux limitations que nous lui connaissons.
Nous
ne pouvons être vraiment heureux que dans l’expérience d’une
continuelle croissance et si celle-ci est physiquement limitée, elle
est spirituellement illimitée. C’est pourquoi le développement de
notre vie spirituelle est la seule chose qui puisse en démontrer la
réalité. Nos affirmations théoriques ou doctrinales ne sont pas
forcément une preuve de croissance spirituelle mais c’est d’abord
la transformation de notre vie qui en est une. C’est ce que Jésus
veut montrer à son peuple en des termes étranges.
Manger la chair et boire le sang du fils de l’homme
La
ville de Capernaüm dans laquelle Jésus tient son discours avait une
mentalité particulière et ce n’est pas pour rien que le Seigneur
emploie cette surprenante image. A la place des gens nous aurions été
certainement aussi surpris et choqués. Jésus n’a jamais choqué
personne par sa vie morale mais son comportement religieux a parfois
montré qu’Il n’était nullement l’esclave des traditions ou
des rites de son époque. Ce qu’Il voulait, c’était de donner
l’exemple de la supériorité de l’amour dans son élan libre et
spontané sur la complexité rigide d’un rituel dépourvu
d’efficacité.
L’origine
des cérémonies sacrificielles remonte bien au-delà de Moïse. Bien
avant lui, l’homme a éprouvé le besoin d’apaiser la divinité
ou de se l’associer par ces pratiques sanglantes. Sur l’ordre de
Dieu, Moïse n’a fait qu’amener les humains à un niveau plus
moral et plus proche des significations spirituelles. Les sacrifices
ont été purifiés par un choix particulier des victimes à offrir
et sur la façon de les offrir de même qu’a été décrété
l’interdiction absolue de sacrifier des êtres humains.
Manger
la chair humaine comme boire du sang était une chose interdite et
une abomination. Certains peuples non juifs le faisaient, le peuple
hébreu lui-même avait suivi parfois ces coutumes idolâtres au
cours de son histoire.
Il
est indéniable que, même dans leur idolâtrie, les hommes ont
recherché ce quelque chose, ce contact avec le divin pouvant les
aider à réaliser leurs espérances et à assurer leur survie. C’est
avec condescendance et compassion que Dieu a aidé sa créature à
gravir les échelons de la révélation par le moyen d’un
symbolisme approprié. Cependant il ne pouvait pas les maintenir
indéfiniment sur le même barreau, et Jésus, loin d’ignorer la
loi particulière aux Juifs, s’en est servi pour leur permettre
d’atteindre un stade supérieur, une compréhension de plus en plus
spirituelle des enseignements de Moïse.
A
ce que nous avons l’habitude de faire ou de penser en matière
religieuse, il y a toujours quelque chose de supérieur. Tout nous
est donné pour nous permettre d’obtenir davantage. La proposition
de Jésus n’invite pas à une régression mentale mais à une
supériorité philosophique et spirituelle. Ses paroles devaient
éveiller chez ses auditeurs un sens nouveau des réalités. Aussi
vrai que la chair et le sang sont des éléments visibles et
matériels, aussi vraies sont les réalités spirituelles.
De
même que l’idéal humain et l’élévation spirituelle sont
traduits en Jésus dans l’existence matérielle de chair et de
sang, ainsi celui qui reçoit le message de Jésus reçoit en lui une
vie spirituelle et idéale qui ne peut manquer de se manifester d’une
façon visible dans l’existence concrète de sa vie matérielle et
physique.
Manger
la chair et boire le sang du fils de l’homme, c’est littéralement
reproduire la vie terrestre de Jésus en ce qu’elle représente de
qualité morale et d’élévation spirituelle.
On
peut discuter à l’infini sur la signification dogmatique des
paroles de Jésus, il n’en demeure pas moins qu’elles visent une
nouvelle révélation : celle de l’esprit.
Si
Jésus a finalement accepté de mourir à la façon d’un être
sacrifié c’est surtout et d’abord pour souligner la supériorité
de l’obéissance à Dieu dans l’amour sur toutes les autres
formes de sacrifice. « Que Ta volonté soit faite et non la
mienne ».
La fatigue de dieu
C’est
ainsi que pourrait se traduire la réaction divine devant le
formalisme religieux à l’époque d’Esaïe le prophète qui
proclame : « Qu’ai-je affaire de la multitude de vos
sacrifices ? dit l’Eternel. Je suis rassasié des holocaustes…
Je ne prends point plaisir au sang des taureaux… mon âme hait vos
nouvelles lunes et vos fêtes… Je suis las de les supporter. Cessez
de faire le mal, apprenez à faire le bien, recherchez la justice… »
(Esaïe 1).
Il
est clair que le but de Dieu a toujours été l’éducation
spirituelle de son peuple et non la simple satisfaction d’exigences
rituelles. La loi écrite sur les tables de pierre au temps de Moïse
devait être celle inscrite sur les cœurs et dans les consciences au
temps de Jésus.
Les
mêmes paroles d’Esaïe pourraient malheureusement se faire
entendre à nouveau sur une chrétienté sclérosée dans le
formalisme. Mais les effets d’une telle religion ne se font pas
longtemps attendre et on la constate de plus en plus aujourd’hui :
la disparition de la paix de l’esprit et du cœur et l’ébranlement
des structures anciennes et des systèmes religieux.
Depuis
que Jésus a offert aux hommes son message libérateur et son Esprit
de Vérité et de puissance, le temple de Jérusalem a disparu et,
avec lui, les pratiques sacrificielles. Ce temple était un
magnifique symbole de la puissance et de la beauté de la vérité
mais lorsque le symbole s’oppose à la vérité spirituelle qu’il
représente, il doit disparaître et d’autant plus quand la vivante
réalité de l’Esprit Divin se manifeste comme elle l’a été
dans la personne de Jésus. Cette histoire n’est pas une
coïncidence mais constitue une étape nouvelle de la révélation de
Dieu aux hommes et celle-ci est loin d’être terminée comme nous
allons le voir.
Vers une révélation nouvelle
La
révélation est constante mais elle ne s’impose pas. C’est ainsi
que Jésus invite ses disciples à rester ou à le quitter comme ont
fait ceux qui trouvaient Sa parole trop dure à comprendre. Si nous
voulons approfondir et purifier notre connaissance ou notre
compréhension de la divinité, nous ne pouvons le faire sans un réel
désir et un amour de la vérité. C’est parce que Dieu tient
compte de notre libre personnalité que Jésus nous enseigne à
demander pour recevoir, à chercher pour trouver et à frapper pour
qu’on nous ouvre. Il faut vraiment manger et boire la substance
vivante et spirituelle offerte par la Parole de Jésus et par toute
la Bible. Personne ne peut manger et boire à la place d’un autre
et c’est par un effort tout à fait personnel que nous devons
obtenir de Dieu ce qu’Il nous propose. Ce n’est pas un effort
surhumain qui nous est demandé mais celui de la bonne volonté à
laquelle Dieu fait la promesse de se laisser trouver.
Lorsque
Jésus prend son dernier repas avec ses disciples et institue la
Sainte Cène, Il met l’accent sur le fait qu’Il ne boira plus de
ce vin jusqu’à ce qu’Il en boive du nouveau dans le royaume de
Dieu avec eux.
Si
la Sainte Cène représente actuellement la réalité d’une
communion spirituelle avec le maître, les signes matériels de
cette même Cène rappellent aux croyants que c’est à eux de lui
donner sa véritable signification : c'est-à-dire leur sincère
désir de lui ressembler en amour et en obéissance à la Volonté de
Dieu. La seule preuve de la Vérité qui nous puissions donner n’est
ni dans la doctrine, ni dans les miracles mais dans la croissance
constante de notre élévation morale et spirituelle.
Bientôt,
dans le ciel, une nouvelle révélation nous sera donnée et nous
boirons avec joie ce vin nouveau car les œuvres de Jésus ne sont
jamais terminées. De même que la création se poursuit toujours
dans les mondes infinis de l’univers, de même nous sommes appelés
à partager avec notre maître les gloires d’une activité infinie.
Mais,
parmi tout ce qui est grandiose dans la création, rien ne l’aura
autant été que cette patiente et progressive révélation de Dieu
pour conduire l’homme du stade animal et matériel à celui de
divin fils de Dieu qui est Esprit et qui veut que sa créature
parvienne à Lui ressembler.
Samuel
GUILHOT 26/
10/ 1969
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